La troisième partie des journées d’étude était consacrée aux sources et d’abord aux apports de l’archéologie avec une intervention de Michaël Landolt et Frank Lesjean intitulée “L’alimentation du combattant de la Grande Guerre à travers l’archéologie : quelles problématiques ?”. Michaël Landolt est archéologue protohistorien et contemporanéiste au pôle d’archéologie interdépartemental rhénan de Sélestat, chercheur associé à l’UMR 7044 Archimède de l’Université de Strasbourg. Il travaille depuis 2005 au développement de l’archéologie des conflits contemporains en Alsace-Lorraine et mène des recherches sur la vie quotidienne des combattants, notamment sur leur alimentation ; il a dirigé la fouille de la galerie allemande du Kilianstollen à Carspach et est co-commissaire de l’exposition A l’Est du nouveau. Archéologie de la Grande Guerre en Alsace-Lorraine qui a donné lieu à un catalogue très réussi. Frank Lesjean se définit comme un “coureur des bois et des champs” ; il est en charge du Centenaire au Conseil Général de la Marne. Il est diplômé de l’EHESS et a mené un travail sur le thème Se nourrir et combattre sous la direction de Stéphane Audoin-Rouzeau. Il est membre actif de l’association Archéologie de la Grande Guerre et travaille sur le chantier du camp de repos allemand d’Apremont en Argonne.
L’archéologie de la Grande Guerre est assez récente, elle a commencé par des recherches sur les corps des soldats, avec des problématiques bien spécifiques, puis s’est développée sur d’autres sujets. On compte actuellement une cinquantaine de fouilles en cours en Alsace, surtout sur des sites allemands.
Dans le domaine qui nous intéresse, les fosses-dépotoirs, les lieux de gestion des déchets et des feuillées sont des lieux de ressources riches. Les intervenants présentent des objets retrouvés comme les caisses à vivres (ravitaillement collectif), les mignonnettes (pratiques individuelles liées à l’alcool), des contenants métalliques (comme les boîtes allemandes pour camembert et roquefort prédécoupés !), des coquilles d’huîtres, escargots et saint-jacques (éclairant sur les pratiques festives).
Les contenants destinés à l’eau sont un autre type de matériel archéologique fréquent, l’Allemagne étant le premier producteur mondial d’eau minérale à l’époque : bouteilles en grès puis en verre pour faciliter la récupération et la réutilisation, bouchons de types divers, bouteilles à bille (que l’on retrouve aujourd’hui au Japon) pour lesquelles on n’a presque aucune mention dans les archives.
Les verres et tasses à moutarde renseignent aussi sur l’esprit de l’époque grâce aux nombreux décors patriotiques développés par les Allemands sur ces contenants.
Des objets bizarres sont cités par les archéologues : bouteilles d’essence d’or (témoignant des pratiques de charlatanisme), tasses percées à l’origine inconnue (percées à la mort de leur propriétaire ?), biberons (pour nourrir les blessés de la face ?), bouteilles de concentré de vinaigre (contre les poux ?), assiettes décoratives (qui évoquent l’envie de normalité) et même pots de chambre !
Les restes alimentaires sont une autre source (traces d’animaux chassés, restes de chien témoignant de la consommation canine encore fréquente à l’époque…). L’archéozoologie est une science utilisée pour, par exemple, étudier les découpes des animaux mangés sur le front et montrer les différences de pratiques bouchères (les Allemands découpent la viande en plus petits morceaux pour bénéficier de davantage de graisse et moelle).
La fouille des latrines donnent d’autres informations, notamment grâce aux parasites retrouvés.
Enfin, l’archéologie témoigne de la débrouille mise en œuvre par les soldats qui fabriquent les objets dont ils sont besoin quand l’équipement fourni est insuffisant : bidons dont on augmente la contenance, gamelle transformée en assiette (pour manger comme chez soi), boîte transformée en lampe, râpe…
Michaël Landolt et Frank Lesjean rappellent qu’il faut encore augmenter les corpus (et donc poursuivre les fouilles) pour pouvoir tirer de plus amples conclusions.
Caroline
Il existe un site dans la Marne,
LA MAIN DE MASSIGES,
à une quinzaine de kilomètres au Nord, Nord-Ouest de Sainte-Menehould (spécialité: les pieds de cochons) qui est extra/ordinaire pour qui aime les fouilles et aime s’enrichir…. intellectuellement.
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http://www.lamaindemassiges.com/visites.htm
Le site, en constante évolution, est désormais accessible au public et libre d’accès sous certaines conditions développées çi-après.
Suite à de nombreux vols, l’accès aux tranchées est désormais interdit de 19h00 à 09h00. Les immatriculations des voitures seront relevées et signalées aux patrouilles.