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Apprenez à déguster la cancoillotte

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Pour vous mettre dans l’ambiance, commencez avec un peu de son !

Ensuite, regardez ce reportage de France 3 pour comprendre comment on fait la cancoillotte.

Page hiver : comment fabrique-t-on le metton ?

Vous avez compris que je vous parle aujourd’hui de notre dernière séance “Apprenez à déguster” qui a eu lieu vendredi 5 février sur le thème de la cancoillotte, afin de célébrer le mariage des régions Bourgogne et France Comté !

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Il n’y a pas qu’une cancoillotte !

Notre invité était Bernard Cassard, ingénieur agricole, longtemps salarié de la Chambre d’agriculture de Haute-Saône, directeur des services en élevage du même département, autoentrepreneur “Conseil en élevage et en agro-alimentaire” depuis 2014 et animateur de l’Association pour la promotion de la cancoillotte dont l’objectif est d’obtenir une IGP pour cette spécialité fromagère.

Passionné, il a su conquérir son auditoire, à la fois pendant la conférence et pendant les dégustations qu’il a toutes commentées.

Pour compléter cet article, reportez-vous aussi à Twitter et au #CancoillotteALaBib.

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Pendant la conférence, Madame Cassard prépare la cancoillotte toute chaude !

L’intervention débute par une partie sur les signes officiels de la qualité permettant de se repérer dans le monde des produits alimentaires. C’est l’Europe du Sud qui utilise le plus ce système de reconnaissance… même si les Anglais, longtemps critiques face à ce qu’ils considèrent comme une entrave au libre commerce, en ont 35 en attente auprès de l’Europe ! A noter qu’un produit labellisé est davantage consommé dans son pays, et même dans sa région, signe d’un attachement au terroir de vie. C’est la France, sans grande surprise, qui invente ces signes de qualité avec le classement des vins de Bordeaux en 1855 et la naissance des AOC en 1905. La première AOP pour un fromage classe le roquefort et la première en Franche-Comté est pour le bleu de Gex en 1935.

  • AOC : appellation d’origine contrôlée : toutes les étapes de fabrication du produit sont réalisées selon un savoir-faire reconnu sur un périmètre géographique précis.
  • AOP : c’est l’équivalent européen de l’AOC.
  • IGP : indication géographique protégée : les caractéristiques du produit sont liées au lieu dans lequel se déroule sa production ou sa transformation selon des conditions déterminées.
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Le metton, à la base de la cancoillotte

J’ai aussi retenu une autre information intéressante : la plupart des produits reconnus par un signe de qualité en France correspondent à la “diagonale du vide“, à ces terres agricoles pauvres mais produisant de petites merveilles ! Soutenez-les par votre consommation !

Bernard Cassard évoque aussi le prix du lait utilisé pour la fabrication de tel ou tel fromage et les écarts énormes entre, par exemple, le beaufort (675 € / 1000 l) et l’emmental grand cru (380 €), c’est-à-dire entre deux fromages qui n’ont pas fait le même travail sur la protection de leur qualité. L’emmental français ne s’étant pas protégé, il peut être fait mal et partout : son lait est mal payé. Exemple contraire pour une autre pâte pressée cuite : le gruyère suisse qui a su se différencier.

Passons à notre (grande) région.

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Fermières ou industrielles, nous les goûterons toutes !

En Côte-d’Or les fromages protégés par un signe de qualité sont le brillat-savarin, le chaource, le charolais, l’époisses, le mâconnais et le soumaintrain. On cite la brillante réussite du comté qu’on avait déjà évoquée dans une séance de Apprenez à déguster il y a deux ans et j’apprends quelque chose auquel je n’avais jamais pensé : le comté est un produit nourricier qu’on ne gardait pas, le comté de 36 mois est donc une invention récente… mais tellement bonne !

En Haute-Saône, l’agriculture n’a pas connu la belle évolution du Jura ou du Doubs, avec un modèle dominant loin des pâtures et des races locales. Mais il reste une spécialité de fromage fondu à valoriser : la cancoillotte, pour laquelle l’association de promotion espère l’IGP !

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Râpe à metton, Musée de Champlitte

L’association travaille notamment à regrouper les preuves de l’histoire de la spécialité : ustensiles du Musée de Champlitte, bibliographie, littérature, chansons populaires, archives d’entreprises… Parmi ces sources, le Sapeur Camember est essentiel… car fils d’Anatole Camember et de Polymnie Cancoyotte !

Spécialité des ménagères, la cancoillotte se fait aussi à partir du 20e siècle dans de petites entreprises : Landel à Loulans-les-Forges ou Raguin (Laurent Raguin aurait commencé à stériliser des pots afin d’en envoyer à son fils au front pendant la première Guerre mondiale) par exemple.

Avec l’émigration haut-saônoise, ce savoir-faire s’est exporté jusqu’au Mexique où l’on trouve de la cancoillotte… au piment… j’ai bien envie de tester.

Où en est-on aujourd’hui ? 6000 tonnes sont consommées chaque année (à titre de comparaison le comté monte à 60 000), 430 producteurs de lait travaillent pour 20 fabricants qui vont des 3 producteurs fermiers jusqu’au groupe Lactalis et se situent en Franche-Comté, dans les Vosges et dans l’Ain. La zone traditionnelle de la cancoillotte est bien plus large, jusqu’à la Moselle, le Luxembourg, la Côte d’Or et la Saône-et-Loire.

Avant la dégustation, la recette artisanale :

  • écrémer le lait
  • faire cailler le lait
  • le chauffer pour l’assécher
  • le presser pour obtenir le metton blanc et sec
  • râper le metton pour l’émietter
  • le chauffer pour l’affiner (on dit qu’on le faisait sous l’édredon !)
  • le faire fondre avec de l’eau / du vin, du beurre et des condiments
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Bernard Cassard à l’écoute des 80 participants

Place à la dégustation !

  • 2 cancoillottes fondues en direct par Madame Cassard, à partir de deux mettons différents : Chansereaux et Poitrey (un petit truc donné par la cuisinière : couvrir le metton d’eau la veille pour éviter les grumeaux !)
  • 2 cancoillottes nature en pots : cancoillotte fermière du GAEC Les Chansereaux et cancoillotte Raguin
  • 1 cancoillotte au vin jaune Belle Etoile
  • 1 cancoillotte à l’ail (heu, j’avoue, je n’ai pas goûté) de chez Raguin
  • une surprise pour finir avec un morceau de Gruyère France !

DSC00772Nos participants ont travaillé pendant toute la dégustation puisqu’ils ont dû noter le visuel, la texture, l’odeur, le goût de chaque cancoillotte ! Le coup de cœur de beaucoup est la cancoillotte fondue à partir du metton de la ferme Les Chansereaux à Bougnon dans le respect de la fabrication fermière mais la cancoillotte reste un produit suffisamment confidentiel pour qu’elles soient toutes de bonne qualité.

Pour finir, quelques livres si vous souhaitez aller plus loin. Pour être franche, il n’y en a pas beaucoup !

D’abord un livre sur l’histoire de la cancoillotte : Robert Bichet. La cancoillotte. Les fromages comtois et la vie rurale et pastorale en Comté paru en 1987 où vous trouverez des informations sur la cancoillotte dans les fermes familiales, sur sa fabrication industrielle au 20e siècle, des recettes, mais aussi des chapitres sur la cancoillotte dans les livres, les chansons et le théâtre.

Et un livre de recettes avec La cancoillote, dix façons de l’accommoder chez L’Epure pour utiliser notre spécialité du jour avec des asperges, des huîtres (heu vous êtes sûre Marie Dargent ?), du haddock, des endives ou dans un bon hamburger (miam, ma dernière tendance burger va au morbier, je vous en reparle bientôt !).

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Fin de partie

Caroline

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7 Responses

  1. Avatar Alain POURE 19 février 2016 / 12 h 15 min

    Bonjour,

    J’ai assisté et participé à la conférence-dégustation. Comme par hasard, la meilleure et de loin, des cancoillottes dégustées était celle de la ferme des Chansereaux. Je n’en ai pas été surpris, pour avoir vécu de près l’évolution de la cancoillotte au cours des décennies passées. L’hyper-concentration du secteur laitier, la normalisation des fabrications avec comme unique objectif une uniformisation des saveurs, c’est-à-dire ZERO goût a atteint aussi la cancoillotte, comme le camembert, le Mont d’or, le Saint-Marcellin, et tant d’autres. Un responsable, un coupable? Pas de nom, bien sûr, mais on devinera facilement qu’il s’y sont mis à plusieurs, comme larrons en foire: la distribution qui n’a de grande que la surface, l’industrie fromagère qui ruine les producteurs de lait, y compris les derniers qui travaillent encore de façon naturelle, dont on aura la peau à force de normes, de contrôles et de rumeurs.
    Les Dijonnais ont cette chance qu’ils ont, toute l’année, la possibilité d’acquérir sur le marché couvert une cancoillotte authentiquement fermière, proposée fondue au beurre ou sous forme de metton à fondre à la maison, à son goût, avec ou sans beurre. Personnellement je préfère sans. Nul besoin d’inclure des artifices comme ces arômes qui donnent beaucoup de relief au…prix!
    Au-delà de la reconnaissance due à des personnes assez courageuses pour maintenir vivant le meilleur de nos productions agricoles, je n’ai pas d’intérêt particulier à promouvoir ce producteur, mais il me semble que la dégustation du 5 février gagne à être complétée par celle d’une vraie cancoillotte qui ignore tout du marketing.
    A la Ferme de Ligny, sous les Halles du côté des poissonniers, vous ferez des découvertes en plus de la cancoillotte: volailles et viandes fermières, beurre cru, crème crue, etc…Je regrette beaucoup que la ferme de Ligny ait été ignorée par M. Cassard, qui a limité à 3 les producteurs de cancoillotte fermière alors qu’ils sont plus nombreux. Pour combien de temps?…

    • Happy Apicius Happy Apicius 19 février 2016 / 16 h 57 min

      Bonjour,
      Je vais interroger M. Cassard sur La Ferme de Ligny et je vous tiens bien sûr au courant.
      Caroline

      • Happy Apicius Happy Apicius 20 février 2016 / 18 h 49 min

        Voici donc la réponse ! M. Cassard connaît bien la ferme de Ligny mais n’a évoqué dans sa conférence que les producteurs qui adhèrent à l’Association pour la promotion de la cancoillotte, qui, du fait de la réglementation, auront le droit d’utiliser le nom “cancoillotte” si l’APC obtient l’IGP. Mais je vais très rapidement me rendre sur les Halles. Habituellement, je mange la cancoillotte… de ma grand-mère faite avec… 125 g de beurre pour un paquet de metton ! Et je vais essayer d’en faire avec une lichette de Château Béthanie fin de cuisson car je voudrais tester avec un vrai goût de savagnin !

        • Avatar POURE Alain 21 mars 2016 / 8 h 53 min

          Je crains donc que la réglementation à venir n’altère le produit cancoillotte en l’affadissant. Hélas, trois fois hélas c’est encore Lactalis qui conduit le bal: ces gens-là ne veulent laisser aucun centimètre carré du domaine du fromage à des francs-tireurs qui travaillent pour la sauvegarde de saveurs authentiques. Cette réglementation aura donc un réel aspect EXCLUSION.
          Tout le monde au garde-à-vous!

  2. Avatar PONTET Dominique 21 février 2016 / 15 h 45 min

    J’ai appris… je déguste ! (cancoillotte, pomme de terre, saucisse de Montbéliard, vin du Jura, salade)

  3. Happy Apicius Happy Apicius 22 février 2016 / 10 h 47 min

    Pour les Dijonnais, je poursuis ma recherche sur les fournisseurs possibles de cancoillottes et de metton. Je viens de repérer que certaines ruches du réseau de Le Ruche qui dit oui vendaient les produits de la fromagerie Mauron (Gray-la-Ville, en Haute-Saône) dont de la cancoillotte absinthe-pistaches ou encore kirsch-griotte ! et ceux de La Boîte à fromages (Isches, dans les Vosges).

    • Avatar POURE Alain 24 mars 2016 / 20 h 40 min

      J’attends avec impatience la variante carambar-spéculoos, maquereau-groseille à maquereau et ketchup-coca-chichon…

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