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Le gigot appartient à ceux qui se lèvent tôt

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Si, à Pâques, vous en avez assez du gigot à l’ail, voici deux recettes à la rescousse, testées et retestées par mes soins depuis longtemps !

Gigot de 7 heures en marinade

gigot-cru

Mariner longuement

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Promis, ce n’est pas brûlé !

                                            La veille, faites mariner le gigot sur un lit d’oignons coupés en rondelles : 1/4 à 1/2 litre de vin rouge, un petit verre de vinaigre de vin, sel, poivre, piment d’Espelette, ail écrasé. Retournez-le après quelques heures.

Le jour J, mettez votre réveil à 5 heures (cher lecteur, sachez que j’ai réalisé cette recette dans la nuit du changement d’heure, admirez mon abnégation), cuisez une demi-heure au four à 180°C puis environ 7 heures à 150°C (retournez-le à mi-cuisson). Le gigot sera fondant à l’intérieur et bien croustillant et caramélisé à l’extérieur ; la viande, très tendre, se découpera toute seule à la cuillère. A servir avec des pois chiche ajoutés en fin de cuisson, une polenta crémeuse et une sauce au yaourt et aux herbes, .

La boulette ou l’art d’accommoder les restes

gigot-kebabSi vous n’aimez pas non plus le gigot réchauffé, faites-en des boulettes ou des escalopettes. Coupez le reste de gigot cuit en petits morceaux et hachez-le. Faites-en une farce avec un œuf, de la courgette râpée, des zestes de citron, du sel, du poivre, du ras el hanout, des herbes ciselées. Formez des boulettes ou des escalopettes et faites les frire à la poêle. Commandez un pain plat chez votre boulanger pour faire des kebabs maison et préparez les accompagnements coupés finement : tomates, sauce au concombre (oui je sais, ce n’est pas de saison), chou rouge, roquette. Servez avec des frites !

Pour le dessert

lamalaPour le dessert de Pâques, si vous voulez une table totalement ovine, faites, comme Dominique, votre propre lamala. Lamaquoi ? lamala, un agneau alsacien (Lamm = agneau en allemand). Dominique était il y a peu encore chef-mag à la bibliothèque patrimoniale. Depuis qu’il est en retraite il s’est non seulement transformé en cordon bleu mais en plus en cordon partageur puisqu’il nous apporte une nouvelle pâtisserie presque chaque semaine. La semaine dernière, il avait déposé couloir bleu (c’est le lieu des victuailles patrimoniales) plusieurs lamalas parfumés au kirsch, au rhum et même à la mirabelle !

Je vous livre la recette du sympathique et grand pâtissier Christophe Felder, d’origine alsacienne (son père était boulanger-pâtissier à Schirmeck) tirée de son livre Exquises pâtisseries pour les fêtes aux éditions du Chêne. Dans son chapitre sur Pâques, il propose aussi les recettes suivantes : nid de Pâques, croquants aux noix de Pécan, terrine orange-pamplemousse-pruneaux, tarte au chocolat mou, stollen aux fruits secs, chocolat chaud du Crillon et brioche perdue caramélisée.

exquises-pâtisseries-fetes-C-FelderL’agneau de Christophe Felder :

Préchauffez le four à 180°C ; faites fondre 20 g de beurre et réservez-le ; fouettez légèrement 4 œufs et 120 g de sucre ; posez le saladier dans un récipient au bain-marie et battez le mélange au fouet 2 à 3 minutes (la pâte ne doit pas être chaude) ; retirez le saladier du bain-marie et fouettez énergiquement (de préférence au batteur électrique) jusqu’à complet refroidissement (la pâte doit former un ruban quand on la soulève avec une spatule) ; versez la farine tamisée en pluie sur la surface de la pâte et mélangez délicatement avec une maryse ; en même temps, ajoutez deux bonnes cuillerées à soupe de beurre fondu ; beurrez abondamment le moule de beurre fondu puis farinez-le ; Cuisez 30 minutes ; démoulez à la sortie du four. Il ajoute par ailleurs des conseils pour préparer un moule et que le gâteau ne colle pas.

Quelques lectures sur le sujet

La plus ancienne référence au gâteau en forme d’agneau à la bibliothèque a 101 ans ; elle est issue de L’Alsace gourmande, poëme gastronomique suivi de cent quarante recettes alsaciennes de Georges Spetz paru en 1914. Dans la chapitre X sur les pâtisseries et gâteaux, on peut lire ces vers… charmants :

Alsace-gourmande-Spetz

L’Alsace gourmande, page de titre

Quand les cloches, retour de Rome,

Gaîment chantent l’alléluia,

Paraissent les Ofekiechlas,

De vanille exhalant l’arome (sic).

On donne aux enfants des moutons

En biscuit, portant l’oriflamme ;

Ils lèchent d’abord la toison

Puis avec leurs dents les entament.

Les enfants de cette douce poésie lèchent certainement le sucre qui recouvre le gâteau mais cela me fait penser aux lamalas que je déguste chaque année et qui viennent d’une pâtisserie de Longwy, en Meurthe-et-Moselle : le gâteau est recouvert d’un chocolat blanc qui craque sous la dent avant qu’on n’attaque le biscuit ! Pas question de le lécher et de le faire fondre, il faut le croquer ! Quoi que… c’est comme avec les petits-écoliers® ou les viennois®, vous commencez par où vous voulez…

La recette des Ofenkiechlas cités se trouve page 161 du même ouvrage : “Prenez un petit  morceau de beurre de la grandeur d’une noix, une chope de lait ; laissez fondre sur le feu le beurre dans le lait en y mettant une pointe de couteau de sel. Pendant la cuisson versez petit à petit une demi-livre de farine, tournez bien votre pâte dans la casserole jusqu’à ce qu’elle s’en détache, puis après avoir laissé refroidir, mettez-y six œufs entiers, l’un après l’autre, en travaillant toujours votre pâte. Vous prenez alors une cuillerée de votre pâte et vous la mettez sur une plaque en laissant à peu près deux centimètres d’intervalle entre chaque cuillerée de pâte. Faites cuire pendant vingt ou trente minutes.”

Cuisine-alsacienne-Hinkel

La Cuisine alsacienne, détail de la couverture

Dans La Cuisine alsacienne de Marguerite Hinkel-Rudrauf (1946), c’est une brioche de Pâques qui est proposée (page 452) : Ajoutez à 1 livre et quart de bonne farine blanche les ingrédients suivants légèrement chauffés : 1 quart de beurre, 1 quart de sucre, deux œufs entiers, une pincée de sel, 1 quart de litre de lait. Mélangez et travaillez à fond la masse, après y avoir ajouté 25 gr. de levure que l’on a fait dissoudre dans un peu de lait tiède. Lorsque la pâte se détache bien du récipient dans lequel elle est travaillée, placez-la dans un lieu chaud pour la faire lever. Pendant ce temps, hachez 1 quart de noisettes, des amandes ou des noix ; mélangez-les avec 100 gr. de sucre, 100 gr. de raisins secs sans pépins, un peu de cannelle et 1 quart de litre de crème fraîche battue en neige. Abaissez la pâte jusqu’à ce qu’elle ait l’épaisseur d’un doigt, badigeonnez-la légèrement avec du beurre fondu, puis étendez dessus la masse crémeuse. Roulez la pâte, laissez lever encore 1 quart d’heure, faites cuire dans un four assez chaud. Glacez la brioche après la sortie du four.

Quant aux quelques recettes de lamalas dans des livres contemporains, il s’agit d’une déclinaison du biscuit de Savoie auquel le moule en terre doit, dit-on, donner un parfum spécifique.

Le-goût-agneau-rubinSur la viande d’agneau, nous ne sommes pas très riches en livres. Le plus joliment réalisé est celui de Michel Rubin, Le goût de l’agneau, traité de recettes monothéistes, méditerranéennes & moyen-orientales.

Que nous soyons juifs avec Pessah, chrétiens avec Pâques ou musulmans avec l’Aïd, l’agneau illustre, pour chacun d’entre nous, le symbole de l’immolation et de la rédemption.

Après une petite introduction sur l’histoire de la viande d’agneau, l’auteur propose des recettes d’agneau “dans son creuset originel”, autour de la Méditerranée, avec des soupes (la chorba, la soupe d’agneau aux pruneaux, la chakchouka…), des entrées (briouats, club sandwich gigot-houmous…), des grillades-rôtis-brochettes (brochettes à la turque sis kebabi, agneau satay, noisettes d’agneau à la chapelure de pain d’épices…), des braisés-sautés-émincés-mijotés (côtelettes sénégalaises yassa, minute d’agneau façon mongole aux graines de sésame, agneau mijoté aux arachides, couscous…), des hachés-boulettes et légumes farcis (kefta aux épices, bouchées à la syrienne, feuilles de vigne farcies, kibbeh libanais, coings farcis à l’iranienne, hachis yéménite à la juive aux senteurs de sésame siniyeh…), des spécialités à caractère festif ou religieux (harira, mrouzya, méchoui, boulettes frites pour la Pâques juive, soupe égyptienne de l’après-Ramadan, soupe de mariage à la turque dugun corbasi, soupe juive pour le jour du sabbat dfina…) et pour finir des spécialités du patrimoine mondial (navarin printanier, irish stew, moussaka, scotch haggis…).

Pour les plus courageux, ou audacieux, ou inconscients ou amoureux de l’Antique, terminons par quelques recettes de notre cher Apicius. La bibliothèque de Dijon vient d’acheter la première traduction en français des Dix livres de cuisine d’Apicius, par Bertrand Guégan en 1933.

Il consacre un chapitre à l’agneau et au chevreau.

Le chevreau ou l’agneau tarpéien (n° 367 page 240) : “Avant de le cuire, parez-le et le recousez. [Broyez] du poivre, de la rue, de la sarriette, de l’oignon et un peu de thym avec du garum. répandez cette préparation sur la bête et faites-la cuire lentement au four, dans une lèchefrite qui contiendra de l’huile. La cuisson terminée, [vous dresserez la bête sur un plat rond], puis vous verserez dans la lèchefrite une sauce ainsi composée : broyez de la sarriette, de l’oignon, de la rue et des dattes, avec du vin, du vin cuit (carœnum) et de l’huile. Quand la sauce sera réduite, vous la verserez dans le plat, [sur la bête]. Poivrez et servez.”

Cuisine-Apicius-1933

Les dix livres de cuisine d’Apicius, couverture

Chevreau au laurier et au lait (n° 369 page 241) :  “Nettoyez le chevreau, désossez-le ; enlevez l’intestin et l’estomac puis lavez-les. Mettez dans un mortier du poivre, de la livèche, de la racine de silphium, deux baies de laurier, un peu de pyrèthre, et deux ou trois cervelles ; broyez tout cela, puis ajoutez du garum et du sel. Sur cette masse broyée versez deux setiers de lait et deux cuillerées de miel. Garnissez alors les intestins de cette préparation et disposez-les en spirale sur le chevreau ; recouvrez-les d’une crépine ou de papier ; vous ficellerez ensuite. Placez le chevreau dans une marmite en terre ou dans une lèchefrite, avec du garum, de l’huile et du vin. Lorsqu’il sera cuit à demi, vous broyerez du poivre et de la livèche, sur lesquels vous verserez du jus de la cuisson et un peu de vin cuit (defrutum) ; mélangez le tout, puis versez cette sauce dans la marmite. Une fois le chevreau à point, vous enlèverez le papier, vous lierez la sauce avec de l’amidon, puis vous servirez.”

Dans le chapitre “foies et poumons”, une autre recette… Foies de chevreau ou d’agneau (n° 397 page 205) : “Mélangez des œufs avec de l’hydromel, ajoutez un peu de lait ; piquez les foies pour qu’ils puissent s’imbiber, et faites-les cuire dans ce liquide. Arrosez-les de garum au vin, puis servez-les, après les avoir saupoudrés de poivre.”

garum : sauce salée à base de poisson fermenté, condiment très utilisé.

rue : plante à fleurs jaunes dont la feuille a un goût amer, toxique à haute dose !

livèche : plante dont les feuilles rappellent la forme du céleri ; feuilles et graines sont utilisées comme condiment.

silphium : plante très utilisée dans l’Antiquité dans la cuisine et la pharmacopée.

pyrèthre : plante de la famille des chrysanthèmes.

Après tout ça, je vous épargne les recettes de la tourte de langues de mouton, des queues de mouton frites et du potage de têtes d’agneau de Massialot (1740, page 109 sqq du tome 1) ; allez, je vous donne le début pour vous faire envie… “Ayant bien échaudé les têtes d’agneau & les pieds, faites-les cuire avec les foyes…” … la suite à la demande !

Caroline

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4 Responses

  1. Happy Apicius Happy Apicius 3 avril 2015 / 14 h 03 min

    Pour répondre à Sophie, il y a beaucoup de marinade dans cette recette (en gros, elle monte à mi-hauteur de la viande) et si on s’applique à retourner le gigot à mi-cuisson et à l’arroser régulièrement, pas de souci ! Happy Caroline

  2. Avatar Pontet Dominique 3 avril 2015 / 14 h 25 min

    Attention ! ne pas cuire le gigot de sept heures avec un bouillon d’onze heures !

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